La droite israélienne prend un nouveau visage ces dernières années. A celui du Likoud s’ajoute désormais celui du parti national religieux, Habayit Hayehoudi, rendu incontournable par son chef et ministre de l’Education Nationale, Naftali Bennett.
LPH a rencontré celui qui se verrait bien Premier Ministre dans un futur proche et qui a des idées claires sur l’avenir de l’éducation de nos enfants en particulier et de notre pays en général.
Le P’tit Hebdo: Qu’avez-vous pensé de la visite de Donald Trump en Israël?
Naftali Bennett: Le Président Trump a clairement montré une proximité et un amour importants pour Israël et ses citoyens. Cela nous change des huit années précédentes. Il a adopté une vision régionale correcte: il a compris que le chiisme radical était le principal obstacle à la stabilité dans la région. Cette position permet aux pays Arabes sunnites, plus modérés, de créer, avec nous, une barrière et de mener une lutte contre cet axe chiite menaçant. La rupture des relations entre certains de ces pays et le Qatar, est, d’après moi, un des résultats de cette pression que l’administration Trump commence à exercer dans la région.
Lph: Cette vision de la région rejoint-elle ce que vous appeliez récemment ”la paix des gens de droite”?
N.B.: Pour je ne sais quelles raisons, il existe un secret bien gardé: il n’y aura jamais d’accord durable avec les Palestiniens. Jamais. Je vous donnerai une explication parmi de nombreuses autres: les Palestiniens exigent Jérusalem, la vieille ville, ce que Ehoud Barak et Bill Clinton étaient prêts à leur accorder (3/4 de la vieille ville, Har Habayit et le Mont de Oliviers), ils ont refusé. Personne aujourd’hui ne leur proposerait cette offre à nouveau et encore moins davantage que ce qu’ils ont refusé alors.
Ce concept qu’il suffit de le vouloir pour qu’un accord durable soit signé, n’est qu’un mythe. J’irais encore plus loin: à quoi le mot ”Sion” et par extension ”Sionisme” fait-il référence? A Jérusalem! Toute l’attention des Juifs pendant 2000 ans tournait autour de Jérusalem: il y a un consensus, Jérusalem ne sera jamais partagée.
La paix des gens de droite se fonde sur la vérité. La vérité, c’est que cette terre nous appartient, que nous ne la partagerons pas. Une vraie paix est une paix courageuse, une paix qui dit que nous ne diviserons pas notre pays, une paix qui dit aussi qu’en Judée-Samarie vivent près de deux millions d’Arabes et qu’il faut leur proposer un statut, une sorte d’autonomie mais sans souveraineté, sans Etat propre.
Lph: N’êtes-vous pas isolés, les ministres et députés d’Habayit Hayehoudi, dans cette approche?
N.B.: Ces dernières années, nous sommes devenus la colonne vertébrale du gouvernement israélien sur le plan des valeurs et du sionisme. Tout le système politique commence à s’aligner sur nos positions de Yaïr Lapid à Binyamin Netanyahou. Nous portons, sans honte, notre opposition aux concessions face aux arabes, nous sommes fiers d’être sionistes, de dire et de montrer que nous sommes attachés à la terre d’Israël et à la Torah d’Israël. Il en va de même dans le système éducatif et judiciaire. Doucement, les discours et les actes tendent à adopter notre vision. Je m’en félicite.
Lph: Et la construction? Peut-on aussi parler dans ce domaine d’un glissement vers une optique de droite plus ferme?
N.B.: La construction n’est pas suffisante. Pendant huit ans, nous avons subi un gel à Jérusalem et en Judée-Samarie. J’attends du Premier Ministre qu’enfin il décide de relancer la construction à Jérusalem notamment avec le quartier Guivat Hamatos et en Judée-Samarie. Bien entendu, si nous avions 15 ou 20 sièges, tout ceci se produirait plus rapidement. Nous agissons de toutes nos forces actuelles pour que la construction reprenne réellement. Le seul parti qui est contre un Etat palestinien, contre des concessions territoriales, qui a arrêté des libérations de terroristes, c’est Habayit Hayehoudi. Nous sommes le rempart. Nous défendons nos racines, ce que les gens qui ont construit le pays et ceux qui y sont montés jusqu’à aujourd’hui sont venus chercher. Quelles sont ces racines si ce n’est le Tana’h? Sinon, allons vivre en Australie! Pourquoi renoncer à Jérusalem, à Hevron?!
Lph: Est-ce cette ligne dure que vous défendez qui vous vaut une certaine inimitié auprès de l’entourage de Donald Trump?
N.B.: Si je suis un obstacle à la division de Jérusalem et de notre pays, alors j’en suis fier. Quand je me lève le matin, je ne me demande pas si les nations vont m’aimer ou pas, je me demande ce qui est bon pour les Juifs. Ce qui est bon pour les Juifs c’est Eretz Israël sans partition, c’est un pays fort et une fierté juive. Les jours où nous étions en exil, où nous avons enlevé la kippa pour ne pas être attaqués sont révolus! Nous sommes une nation indépendante qui regarde son intérêt. Seule notre foi et notre puissance nous maintiendront ici pour l’éternité, certainement pas des concessions. La méthode des concessions est perçue comme une faiblesse, elle nous apporte l’inverse de ce que nous recherchons. Le monde méprise un Etat qui est prêt à accepter d’être découpé.
Lph: Venons-en à votre portefeuille ministériel: l’éducation. Etes-vous optimiste pour l’avenir de notre système éducatif?
N.B.: Ces deux dernières années, nous assistons à une révolution dans le monde de l’éducation suivant les deux piliers que j’ai mis en avant: sionisme et excellence. Dans toutes les écoles du pays maintenant, les élèves sont davantage sensibilisés au sionisme et à l’héritage juif pour savoir d’où nous venons.
Par ailleurs, les données concernant le niveau des élèves israéliens en mathématiques, en sciences et en anglais étaient largement insatisfaisantes. Je ne pouvais pas le tolérer. Je suis heureux que le nombre d’élèves qui présentent 5 unités au bac en mathématiques ait augmenté de façon spectaculaire, y compris dans la périphérie. Grace à cela, c’est une véritable transformation sociale que nous sommes en train de réaliser. Nous ouvrons à tous les enfants d’Israël davantage d’opportunités pour leur avenir. C’est une première dans la société israélienne: une égalite des chances quelle que soit l’origine sociale ou géographique de l’enfant. Aujourd’hui il n’existe plus d’écoles dans lesquelles on ne peut pas présenter 5 unités en mathématiques.
D’ieu n’a pas distribué une part plus grande d’intelligence à Tel Aviv qu’à Yeroham! Ce qui m’importe c’est d’inculquer aux enfants qu’ils ont des talents, qu’ils doivent travailler, faire des efforts et croire en eux. On doit se donner du mal pour atteindre l’excellence, mais c’est à la portée de tous. Nous devons éduquer nos enfants dans ce sens. Nous ne renonçons à aucun enfant.
Nous avons aussi réduit le nombre d’enfants par classe de la kita alef à la kita guimel avec 27 enfants en moyenne par classe et pas 40. Nous avons ajouté 4600 assistantes maternelles supplémentaires pour les petits.
Nous travaillons pour créer des générations d’enseignants et d’élèves mieux équipés et mieux orientés pour réussir dans le 21e siècle.
Lph: Autre portefeuille en votre possession: la Diaspora. Quel est votre regard sur la baisse dramatique du nombre d’olim, notamment de France, cette année?
N.B.: L’une des plus grandes bénédictions que l’Etat d’Israël ait reçue ces dernières années c’est l’alya de France. Ces olim arrivent avec un grand amour pour la tradition, pour la terre d’Israël, pour le peuple d’Israël.
Le ministère de l’Education investit des millions de shekels pour les olim de France et de Belgique. Grace à ces budgets que nous avons obtenus, chaque élève olé a le droit de bénéficier de soutiens dans différentes matières.
Des conseillers accompagnent les parents pour les guider dans le système éducatif israélien. Nous sommes dans la bonne direction pour accueillir des olim. Nous savons que de notre réussite dépendra d’autres vocations à l’alya.
Nous travaillons avec le Premier ministre pour créer des commissions interministérielles pour aider à la reconnaissance des diplômes.
Ainsi nous espérons encourager de plus en plus de Juifs de Diaspora et de France en particulier à nous rejoindre, ici, en Israël.
Lph: Pour conclure, quelle est la vision qu’Habayit Hayehoudi portera dans les prochaines années?
N.B.: Notre parti, qui représente les valeurs auxquelles nous sommes attachés, la puissance et la fierté du peuple et de l’Etat d’Israël, dans tous les domaines, doit diriger le pays. Nous espérons obtenir entre 20 et 25 mandats aux prochaines élections. Je sais que le public francophone est l’un des plus proches de nos idées. Je souhaite vous voir tous derrière nous!
Propos recueillis par Avraham Azoulay
Photos à la une: Flash90