* Le renforcement des groupes et régimes
terroristes alliés à Téhéran
Selon l’avis d’une majorité d’experts, le renforcement de l’Iran rendu désormais possible grâce à l’accord sur le nucléaire va se traduire par un renforcement parallèle non seulement du Hezbollah et des forces chiites au Liban et en Syrie ainsi que du Hamas de Gaza, mais aussi du mouvement chiite Houti au Yémen et plus généralement de tous les groupes armés chiites (comme au Bahreïn, au sud de l’Arabie Saoudite et au Koweït) noyautés depuis longtemps par Téhéran dans tout le Moyen-Orient qui ont déjà produit leurs effets déstabilisateurs et dévastateurs.
Dopant l’influence iranienne, le pacte arrêté à Vienne le 14 juillet va accroître et envenimer l’ensemble des conflits régionaux et non pas les « calmer » comme les Américains et les Européens l’ont si naïvement déclaré en croyant ainsi « responsabiliser » l’Iran par cet accord qui a sciemment évité de traiter d’autres dossiers que le nucléaire.
Fait significatif : tout comme le No1 du Hezbollah, Hassan Nasrallah, le dictateur syrien Bachar Assad fut l’un des premiers à congratuler les mollahs iraniens pour cet accord dont l’une des conséquences sur la situation prévalant en Syrie pourrait être la survie de son régime pourtant agonisant… Notamment si Téhéran renforçait son aide militaire et logistique directe et indirecte (par l’intermédiaire du Hezbollah présent en Syrie) déjà prodiguée depuis 4 ans à l’armée d’Assad. Une perspective qui inquiète les forces de la rébellion sunnite.
Plus généralement, une fois l’Iran consacré comme superpuissance régionale, il est fort probable que le conflit global Chiites-Sunnites qui secoue le Moyen-Orient depuis 2011 va encore s’aggraver et s’étendre, avec encore plus de radicalisme, d’extrémisme et de terrorisme… Un phénomène qui pourrait aussi menacer la Jordanie du fait de ses frontières communes avec la Syrie et l’Irak (un pays aux déjà mains des Chiites).
Autre double conséquence : outre le fait que les USA seront bien plus enclins à fermer les yeux sur les activités subversives iraniennes dans toute la région, il est fort probable que l’Iran exigera sous peu des Occidentaux qu’ils retirent l’organisation des Gardiens de la révolution islamique et sa Brigade Al-Qods de leurs listes des groupes terroristes…
* Vers un rapprochement entre Israël et les pays
sunnites modérés ?
Paradoxalement, cette aggravation prévisible de tous les nombreux conflits secouant la région pourrait générer au niveau de la « realpolitik » un rapprochement voire une coopération entre Israël et certains pays arabes dits « modérés » comme l’Arabie Saoudite et certains Etats du Golfe : non parce qu’ils se trouveraient soudain des affinités communes, mais parce qu’ils vont partager dorénavant des intérêts défensifs communs très concrets et pragmatiques face à la puissance iranienne en pleine expansion.
C’est ainsi que tout dernièrement en Suisse, des officiels israéliens ont rencontré leurs homologues égyptiens, jordaniens, saoudiens et des pays du Golf à l’occasion de pourparlers informels sur la non-prolifération des armements dans la région. Et ce alors que Dore Gold, le nouveau directeur du ministère israélien des Affaires étrangères, rencontrait aux USA le général saoudien Anwar Eshki afin de définir les convergences sécuritaires entre Jérusalem et Ryad.
D’après Mordechaï Zaken, un expert israélien des minorités au Moyen-Orient et ex-conseiller aux Affaires arabes à la présidence du Conseil, « il n’y a dans ces rapprochements en cours aucune sympathie commune mais il y est uniquement question d’intérêts sécuritaires. De toute manière, les pays arabes sunnites n’attaqueront jamais l’Iran après cet accord ni ne publieront jamais le contenu de leurs éventuels relations stratégiques et de coopération militaire avec Israël… Et ce, même s’ils seraient très satisfaits que l’Etat hébreu détruise les infrastructures nucléaires iraniennes ».
Tel n’est pas l’avis de Shabtaï Shavit, qui fut directeur du Mossad entre 1989 et 1996 , car pour lui, les grands dangers sécuritaires inhérents à l’accord de Vienne constituent « une énorme fenêtre d’opportunité » pour lancer une véritable coopération entre Israël et les pays sunnites modérés, « ce qui pourrait ouvrir ainsi une nouvelle ère diplomatique au Moyen-Orient ». Et d’ajouter : « Les pays sunnites comme l’Egypte, la Jordanie et les monarchies du Golfe se méfient terriblement de l’Iran, leur adversaire commun – ce qui range de facto Israël lui aussi dans le camp des modérés. En s’alliant à cet islam sunnite modéré, Israël pourrait contrer les effets à hauts risques de la nucléarisation de l’Iran et créer, ce faisant, un nouvel ordre au Moyen-Orient. Notamment parce que ces pays pourraient aussi aider à résoudre à terme l’épineuse question palestinienne en neutralisant les effets souvent négatifs de l’influence américaine et européenne ».
* Une nouvelle donne pour la sécurité d’Israël
Nul doute que l’accord de Vienne modifie les paramètres régionaux de la sécurité d’Israël, qui devra donc désormais s’accoutumer à vivre sous une constante menace nucléaire iranienne. Cette nouvelle situation marquée par un environnement en plein changement va exiger des dirigeants de l’Etat hébreu une refonte totale de son dispositif de défense stratégique.
Et pas seulement au plan strictement doctrinaire d’une nécessaire politique de « dissuasion nucléaire publique », comme le recommandent depuis longtemps certains experts tels le Pr. américain Berrès, mais plus concrètement par un élargissement et un renforcement urgents du programme israélien d’anti-missiles et de défense de ses frontières et de son espace aérien et maritime.
Dans ce contexte fait de craintes et d’incertitudes, la coopération militaire entre Israël et les Etats-Unis va se poursuivre dans plusieurs domaines comme la cyberguerre, les procédés anti-roquettes et surtout avec la livraison en 2017 à l’aviation de Tsahal des premiers chasseurs-bombardiers à longue portée de type F-35. Et ce, sans forcément de gros « coups d’éclat » positifs ou négatifs…
Voilà pourquoi cette nouvelle situation sécuritaire régionale relance avec acuité le débat sur l’opportunité et surtout la faisabilité d’une attaque préventive israélienne contre les infrastructures nucléaires iraniennes.
Pour certains experts, l’accord de Vienne vient de sonner le glas d’une telle option, car, disent-ils, au-delà des nombreuses difficultés techniques et logistiques inhérentes à ce genre d’opérations lointaines, on verrait mal l’armée israélienne se lancer dans une telle aventure alors que les grandes puissances viennent de pactiser avec le régime des mollahs en choisissant de le renflouer aux plans financier et économique.
Pour les autres au contraire, l’option d’une telle attaque est justement encore plus actuelle – y compris à court terme… à savoir jusqu’en décembre prochain – après le largage en bonne et due forme des intérêts vitaux d’Israël et des pays sunnites modérés par l’administration Obama et l’Europe avec la bénédiction de la Russie et de la Chine. Selon eux, Israël – avec l’appui des Etats arabes sunnites – serait justement à même de remplacer les USA en tant que superpuissance régionale en détruisant les sites nucléaires des mollahs et/ou en adoptant une nouvelle stratégie publique de défense nucléaire.
C’est en substance ce que sous-entendait le Premier ministre Netanyahou lorsqu’il a déclaré au lendemain de « l’erreur à dimension historique » de l’accord de Vienne que Jérusalem maintenait « l’option d’une frappe militaire contre l’Iran si ses intérêts existentiels étaient en jeu et que les dirigeants iraniens continuaient d’appeler à la destruction d’Israël ».
Richard Darmon Edition française hebdomadaire de HAMODIA