En comparant les synagogues de tel ou tel rite, on peut affirmer que la ligne de conduite est pratiquement la même. Mais bien évidemment, des différences importantes concernant la forme les singularisent: Rituel de prières, fonction rabbinique, places d’honneur, disposition des sièges …Nous pouvons encore en ajouter encore une qu’il est utile de souligner: le choix difficile de celui qui méritera d’ouvrir l’Arche Sainte, de porter le Sefer Thora, de monter à la Thora, de lire la Haftara …
Dans certaines communautés, Shabbath et jours de fête, cet honneur est accordé au plus offrant (ou à la plus offrante). Avant la lecture de la Thora, un des fidèles, membre du comité ou non, fait office de commissaire-priseur qui, en toute neutralité, ‘vend les montées’ à la Thora. Pour cela, il faut qu’il tende l’oreille, comprenne les deux ou trois doigts pointés vers le ciel ou les regards allusifs. ‘Trois fois “‘Hai Shekels”, 26 Shekels, 52 Shekels, eux et leurs multiples … autant de nombres symboliques, inventés ou non, que lancent çà et là les membres de la communauté et rarissimes sont les appels qui restent sans réponse. Parfois, et c’est dommage, cet entracte fragilise la ferveur de la prière par des mots déplacés ou des remarques inutiles.
S’il est vrai que certains considèrent cet usage comme inadapté au lieu sacré, la vente des Mitsvoth a l’avantage d’être transparente: Tout le monde peut en suivre l’évolution et y prendre part ou non, selon son budget. On peut critiquer cet usage en réclamant que seuls les nantis s’arrogent le privilège de monter à la Thora, ce qui n’est pas vraiment exact: Il arrive souvent que l’un surprenne l’autre en lui offrant, en monnaie sonnante et trébuchante, le privilège de monter à la Thora, créant ainsi une nouvelle amitié. Ou bien encore, et de façon ponctuelle, un des administrateurs prend l’initiative d’ajouter aux sept montées traditionnelles une supplémentaire (‘Mossif’) pour satisfaire à la demande de celui qui n’a pas pu financièrement participer à la vente des enchères.
Dans d’autres communautés l’administrateur, responsable des montées à la Thora, élu d’année en année de façon démocratique ou pour toute une vie, décide seul qui montera à la Thora. Parfois, il s’aide d’un ordre alphabétique des fidèles, mais j’imagine que cela ne doit pas toujours être facile en raison des absences, des retards ou autres. En théorie tout se passe comme s’il restait neutre, mais la pression sociale, les nécessités, les privilèges font qu’il lui est parfois difficile de l’être et nous dirons que c’est humain. Certes, il existe tout de même des administrateurs qui font de leur mieux, en essayant d’être le plus objectifs possible, mais cette formule est à prendre malgré tout avec des pincettes, parce que pouvant créer des tensions inutiles.
Personnellement, je pense que, des deux options, la première est la meilleure, même si elle est moins élégante que la seconde, même si parfois elle indispose. Mais on y gagne sur tous les tableaux: D’une part, l’administrateur se décharge d’une responsabilité parfois embarrassante et d’autre part, la parole est au public qui se juge lui-même. Mais qu’il s’agisse de la première ou de la deuxième formule, je ne connais à l’heure actuelle aucune personne qui n’ait pas eu la possibilité de monter à la Thora quand elle le désirait et les occasions, à part l’office du Chabbath matin et fêtes, sont nombreuses. Ajoutons que la bénédiction de la Thora reste toujours la même, peu importe le jour choisi.
En conclusion, n’oublions pas que tous s’intéressent au bon fonctionnement de la synagogue et grâce à ces ‘montées’ participent, de près ou de loin à ses dépenses mensuelles ou ponctuelles et à ses initiatives.
Yaakov Levi
Rav Kehilath Atrid (Arnona Hatse’ira, Jérusalem)