Chlomo Zemmour
Cadre en éducation
La hassidout du Baal Chem Tov (1698-1760) apparaît au 18ème siècle en Pologne quand les Juifs sont au plus bas de leur Histoire, les pogroms des cosaques de Khmelnytsky ont fait presque cent mille morts et détruit 700 communautés, et le désespoir causé par les faux messianismes de Shabbatai Tsvi (1626-1676) et de Jacob Frank (1726-1791) est au plus profond. Les communautés juives restantes étaient désœuvrées. Tout avait été remis en cause par ces faux messies, comment pratiquer les mitsvot ? Comment prier ? Comment croire en l’élite juive ? Les réponses du passé ne suffisaient plus. C’est alors qu’apparaît le Hassidisme. Son rôle fut considérable pour reconstruire le judaïsme polonais. « Le savoir humain a ses limites et l’homme ne peut appréhender intellectuellement ce qui le dépasse… D. est parfait et la raison humaine est imparfaite, aussi l’homme doit-il suppléer par la foi à la carence de sa raison quand il ne peut par elle appréhender certains aspects de D. » (Introduction à la traduction française du Likouté Amarime en français, 1967). C’est cette conception du judaïsme qui a inquiété les grands centres d’études de la Torah en Lituanie. Il suffisait dès lors d’être un Juif croyant et accomplissant les préceptes du judaïsme dans la joie. Le Gaon de Vilna (1720-1797) mena une lutte acharnée contre la Hassidout qu’il jugeait être un danger pour l’avenir du judaïsme. Le Rav Tsvi Yehouda Kook, tout en y trouvant beaucoup de positif faisait remarquer : « la Hassidout s’adresse à ce qui est émotionnel alors que la Torah c’est l’intellect ». On comprend mieux l’opposition du Gaon de Vilna qui était la lumière de la Torah face à la Hassidout qui donnait une place centrale à l’émotionnel (la prière, le nigoun, la danse, etc.) et moins à l’intellect et à l’étude de la Torah. La Torah est du domaine public pour l’ensemble d’Israël, le sentimental, l’émotionnel relèvent du domaine privé, de l’individuel ; la Hassidout visait donc à renforcer la personnalité individuelle contrairement à la Torah et aux mitsvot qui visent l’ensemble collectif d’Israël. Le Hassidisme s’est répandu dans l’ensemble des communautés d’Europe très rapidement mais il n’a pas réussi à réaliser son idéal messianique de par la Shoah. Cet idéal messianique c’est le sionisme qui commencera à le réaliser…
Emmanuel Bloch
Avocat. Spécialiste de pensée juive
L’apport de la ‘hassidout au peuple juif dans son ensemble est absolument immense ! Plutôt que de (mal) résumer un vaste héritage en quelques mots étriqués, je choisis de me concentrer sur une idée essentielle : celle de l’immanence de la divinité. Dieu nous apprend la ‘hassidout, est présent partout (leit atar panouy minei). Il n’a pas besoin d’être recherché seulement à la synagogue, au beit hamidrash, dans les mitsvot et dans l’étude de la Torah, mais Sa présence peut être perçue au quotidien, dans la vie de tous les jours, dans tous les endroits. C’est une conséquence directe de l’idée lourianique du Tsimtsoum, comprise allégoriquement (tsimtsoum lo kipchouto). Sauf exceptions (R. Abraham Ha-Malakh, R. Na’hman de Braslav, ou R. ‘Hayyim Haikel de Amdour sont de rares exemples de maîtres ‘hassidiques ascétiques), la ‘hassidoute veut créer un contact entre l’homme et cette présence divine omniprésente. Le travail spirituel du ‘hassid permet ainsi d’élever le monde spirituellement. C’est l’idée de la Avoda baGachmiout : l’action la plus profane peut devenir l’expression d’une spiritualité intense. De ceci découle ce qui est peut-être l’intuition religieuse la plus profonde du mouvement : puisque Dieu est partout, il est aussi présent dans l’âme humaine. L’homme est un reflet de la divinité, et au cœur de sa nechama il est possible de retrouver toute la mécanique céleste des sefirot. Dès lors, on saisit que celui qui veut comprendre Dieu doit se livrer à l’introspection. Il doit inspecter l’intérieur de son âme. Vertigineuses perspectives, à mille lieues de ceux qui n’imaginent rencontrer le divin que dans le rituel ou dans l’étude.
David Mansour
Guide touristique
Fondateur de tiyoul-tov.org
Elle a apporté la survie d’une certaine manière du Peuple Juif, à une époque où il subissait plus que jamais les affres spirituelles et physiques de l’exil. Elle a été un réconfort, une lueur d’espoir pour surmonter l’insurmontable ! Avec un regard porté toujours vers l’avenir et fidèle au patrimoine collectif de notre peuple. Elle a aussi contribué à notre retour sur notre terre en développant entre autres Jérusalem, Tsfat, Hevron, Tibériade et on peut donc difficilement nier leur participation à l’établissement d’un foyer juif en Terre Sainte. Aujourd’hui encore chaque Hassidout fait partie des multiples visages de l’identité du Peuple Juif œuvrant chacune à sa manière et selon des buts fixés : comme les Habad déployés aux quatre coins du monde jusqu’aux endroits les plus égarés afin d’être toujours là pour chaque Juif et de s’inquiéter de son identité juive, c’est simplement magnifique ! Il y aussi les Breslev avec leurs pensées toujours très positives et joyeuses et leur recherche de proximité intense avec Hachem. Bref depuis notre retour sur notre terre et la création de notre merveilleux État, notre peuple est en pleine effervescence du retour aux sources et aux qualités morales et spirituelles. Et comme disent nos sages, la Thora a 70 facettes, et la Hassidout en est une sans aucun doute. Am Israel H’ai !