Personnalité du monde journalistique en France, Paul Amar a également été directeur de l’information de la chaine I24 à Tel Aviv jusqu’en mars 2017. Du reportage de guerre à la présentation du journal de 20h en passant par l’animation de nombreux débats politiques, Paul Amar a toujours accordé une grande importance à la neutralité dans son travail de journaliste. A l’heure où beaucoup de voix dénoncent le manque d’objectivité de certains journalistes, c’est pour parler du pouvoir réel ou illusoire des medias que Paul Amar est invité le 21 janvier prochain, sur le Campus Francophone de Netanya.
Le P’tit Hebdo: Comment décrivez-vous l’évolution de l’influence des medias avec notamment l’émergence des réseaux sociaux?
Paul Amar: Les medias ont été un quatrième pouvoir pendant longtemps. Depuis ces dernières années, force est de constater que leur influence diminue lentement mais sûrement. Les medias traditionnels sont en train d’être supplantés par le net qui balaie tout sur son passage. Cette technologie de l’instantané possède un versant magnifique mais aussi un versant diabolique. Elle donne la primeur à l’émotion au détriment de la réflexion avec la possibilité, en toute impunité, de diffuser ce que l’on appelle les ”fake news”.
Lph: Comprenez-vous que les journalistes aujourd’hui soient souvent soupçonnés de connivence politique?
P.A.: Les journalistes en France sont la profession la moins aimée après celle des huissiers… Ils paient effectivement, pour certains d’entre eux, une connivence voire une complicité avec le pouvoir politique pendant des années. Les téléspectateurs ne sont pas sots. Nous devons repenser le rôle du journaliste. Avant il était l’intermédiaire entre l’émetteur (le politique) et le récepteur (les citoyens). Cette fonction sociale est en train de disparaitre. A nous de compenser par une plus grande capacité d’analyse et de récupérer ainsi le pouvoir du journaliste, celui d’être un éducateur et un pédagogue.
Lph: Vous avez fréquenté le monde médiatique israélien. Souffre-t-il des mêmes travers?
P.A.: De mon passage en Israël, je retiens une grande fierté face à un monde médiatique dynamique, reflet d’une démocratie vivante. Les medias français ne savent pas suffisamment la liberté de ton et d’écriture dont jouissent les journalistes en Israël.
Lph: Comment expliquez-vous l’hostilité des medias français vis-à-vis d’Israël?
P.A.: La plupart des medias en France ont une perception terrible d’Israël, ils se sont forgés une image négative qu’ils ont collé pour ma génération, à la colonisation de l’Algérie et pour celle d’après, à l’apartheid en Afrique du Sud. De nombreux clichés sont véhiculés sur Israël. On ne parle jamais de la démocratie israélienne, des droits accordés aux minorités. J’ai été frappé par le discours d’un arabe homosexuel qui reconnaissait pouvoir vivre libre à Tel Aviv, alors qu’à quelques dizaines de kilomètres de là, il serait exécuté. On ne met pas en avant ces personnages. Certains correspondants répondent à une demande de leurs états-majors et ne veulent pas voir la complexité du Proche-Orient.
Lph: Le traitement médiatique d’Israël est-il l’une des causes des manifestations violentes contre Israël et par ricochet contre les Juifs en France?
P.A.: Ces medias, qui véhiculent une image négative d’Israël, ont clairement une part de responsabilité même si elle n’est pas volontaire. L’antisémitisme se nourrit de l’antisionisme. A force d’écrire qu’Israël est un pays occupant, d’apartheid, ils ont fini par convaincre notamment la jeunesse surtout d’origine maghrébine. Ces medias pèsent ainsi, de façon insidieuse, sur les réactions populaires.
Conférence le dim 21 janvier, 19h30, Collège Académique de Netanya
Réservations: 09-8607417 / [email protected]
Propos recueillis par Guitel Ben-Ishay
Photo: Artamir
Responsabilité de la caste journalistique et toujours du quai d’Orsay antisioniste par essence