Vivre en 2018, c’est être en quête de rapidité, afin de ‘gagner du temps’, et pourtant ne jamais avoir ce prétendu temps.
Vivre en 2018, c’est courir après l’argent, et perdre littéralement le sens de la valeur des choses.
Vivre en 2018, c’est avoir gommé les traces timides du lien entre l’homme et son créateur.
C’est pour échapper à cette forme d’amertume du monde que nous comptons le Omer.
Compter le Omer, c’est témoigner chaque jour que nous languissons Achem. Dans un monde où tout va vite, et où nous n’avons le temps de rien, nous pronons une coutume des plus archaïques : celle de languir.
Languir une chose, c’est palpiter d’excitation à l’idée que certains petits jours nous en séparent. C’est les compter, comme un enfant compterait les jours avant de recevoir un jouet. C’est oser scander haut et fort une réalité gênante : celle suivant laquelle il est bon de ne pas obtenir tout et tout de suite.
Une chose obtenue sans attente, c’est le temps qui l’a amenée, et c’est le temps qui l’emportera. Une chose obtenue dans l’attente, c’est une chose qui nous laisse un souvenir ineffable, celui d’avoir mis un peu d’espoir, un peu de nous-mêmes dans cette chose.
Une coutume du Maroc veut qu’on distribue du sel le premier jour du Omer. Le sel ne pourrit pas et a en plus pour vertu de conserver les aliments. Il est le symbole de l’alliance avec Achem. Ne pas pourrir, c’est défier le temps. C’est défier la recherche de l’immédiateté. C’est garder un lien avec l’éternité.
Extrait du cours du rav Ifrah du 11.4.18, d’après les enseignements de Rabbi Na’hman.
Nina Sahel