Plusieurs personnes se demandent souvent pourquoi le gouvernement israélien, bien qu’il tienne un discours si favorable envers l’Aliya des Francophones, ne fait rien pour l’encourager. Au contraire, même les obstacles les plus ridicules qui empêchent cette Aliya tardent à être supprimés (par exemple, la reconnaissance des diplômes). En réalité, la raison est assez simple. Jusqu’à aujourd’hui, la communauté francophone en Israël n’a pas su utiliser les leviers qui influencent les membres de la Knesset de manière efficace. Un membre de la Knesset est motivé par certaines choses très précises, pas uniquement par son idéologie.
Tout membre de la Knesset recherche une présence médiatique. Il est également influencé par le contact avec des personnes ayant des ressources qui pourraient l’aider dans le futur à faire campagne dans les primaires grâce à de généreuses donations (dans les limites de la loi). Cependant, dans les partis organisant des primaires (aujourd’hui : Bayit Yehoudi, le Likoud et le Parti Travailliste), la chose la plus importante pour un membre de la Knesset est de satisfaire les membres de son parti – ceux qui ont pris leur carte de parti. En effet, le système électoral israélien est basé sur des listes présentées par chaque parti à la Knesset. Chaque parti fait rentrer à la Knesset un nombre proportionnel de députés en fonction du nombre de voix qu’il a reçu, en se basant sur cette liste.
Donc, la chose la plus importante pour un membre de la Knesset voulant garantir sa carrière est d’être en position élevée sur la liste. Par exemple, lors des dernières élections si quelqu’un était au numéro 31 sur la liste du Likoud, il ne rentrait pas à la Knesset alors que le « numéro 30 » devenait membre de la Knesset, puisque le Likoud a reçu 30 mandats. Ainsi, pour les membres de la Knesset, leurs véritables “employeurs’’, ceux qui décident de leur carrière, sont ceux qui décident à quelle position ils seront placés sur la liste. Cela signifie que dans les partis avec des primaires démocratiques, c’est avant tout les personnes qui ont une carte de parti qui sont les vrais patrons des membres de la Knesset, et ce sont eux qui forment le réel électorat pour ces membres de la Knesset, et non le public général ! En effet, du temps où je travaillais avec plusieurs membres de la Knesset, lorsque certaines personnes voulaient les rencontrer, la première question qu’ils leur demandaient était : combien de membres du parti, titulaires d’une carte de parti, représentez-vous ? La réponse à cette question définissait si le rendez-vous serait dans une semaine, ou dans six mois.
Pour avoir une influence, le public francophone doit absolument s’encarter dans les différents partis, chacun selon son idéologie, et participer à la vie politique du parti. C’est cet encartage qui élèvera les besoins de notre communauté d’une simple question idéologique parmi tant d’autres, à un réel dossier avec des avantages politiques pour les membres de la Knesset. Et lorsque le public francophone aura enfin un poids politique en Israël, nous pourrons ensuite demander non seulement : « Comment la communauté francophone peut-elle bénéficier de sa propre implication politique pour faciliter l’aliya des Français et des Francophones ? », ce qui est une question importante de fait, mais aussi nous pourrons également poser une question bien plus importante : « Que pourrait apporter cette communauté pour l’évolution et la croissance culturelle, économique et religieuse de l’État d’Israël tout entier » ?
Je suis convaincu que c’est notre rôle, dans l’histoire du peuple Juif, de garantir cet apport, et que seule une plus grande implication peut nous aider à accomplir un rôle historique.
Dan Illouz