Question :
Cher Rav, j’ai entendu dire que lorsque l’on retrouve un ami proche perdu de vue depuis plus de 30 jours, l’on est tenu de réciter la bénédiction de Chéé’hiyanou. Est-ce vrai, et si oui, le fait d’avoir eu de ses nouvelles de temps à autre change-t-il la donne ?
Réponse :
Le Choul’han Aroukh (Ora’h ‘Hayim chap. 225 § 1) stipule effectivement que lorsque l’on rencontre un très bon ami que l’on n’a pas vu depuis plus de 30 jours, il est de règle de réciter cette bénédiction. Il ajoute que si l’on ne l’a pas vu depuis plus d’un an, il convient alors de réciter la bénédiction de « Baroukh… Mé’hayé Hamétim (Celui…qui ressuscite les morts) ». La question se pose alors de savoir la raison pour laquelle la récitation de ces bénédictions est de nos jours quelque peu tombée dans l’oubli.
En fait, il est vrai que certains décisionnaires recommandent de nos jours de ne pas réciter ces bénédictions en faisant mention du Nom de D. Ils craignent en effet, que par volonté de flatter, les gens n’en viennent à les réciter à propos de personnes loin d’être aussi proches qu’ils voudraient le leur laisser croire. Or, ces bénédictions ne peuvent être récitées, en bonne et due forme, qu’à l’occasion de retrouvailles procurant une joie sincère et sans partage. C’est pourquoi, selon ces décisionnaires, elles seront récitées sans la mention du Nom de D.
Toutefois, les décisionnaires, dans leur majorité, s’accordent à dire que toute personne éprouvant une joie réelle à l’occasion de retrouvailles avec un ami est en droit de réciter ces bénédictions en faisant mention du Nom de D.
Venons-en à présent à la seconde partie de votre question. Mais pour ce faire, il me faut tout d’abord expliquer la raison pour laquelle l’on est tenu de réciter la bénédiction de Mé’hayé Hamétim lorsque l’on retrouve un ami perdu de vue depuis plus d’un an. Selon le Maharcha, chaque fête de Roch Hachana constitue tous les ans pour chacun d’entre nous un moment décisif : D. va-t-il ou pas nous accorder une nouvelle année de vie ? Lorsque je rencontre un ami que je n’ai pas vu depuis plus d’un an, il est certain que Roch Hachana est passé par là. Le fait de le retrouver bien vivant et de savoir qu’il a passé ce cap sans encombre me pousse à remercier D., par le biais de cette bénédiction, pour l’avoir gratifié de ce magnifique cadeau qu’est la vie.
Le fait d’avoir eu, entre temps, des nouvelles de l’ami en question change-t-il les données du problème ? Selon le Michna Broura (ibid. § 2), il n’existe plus en ce cas de raison de réciter ni la bénédiction de Chéé’hiyanou ni celle de Mé’hayé Hamétim. Cependant, nombreux sont les décisionnaires qui contestent la position du Michna Broura et qui établissent une différence claire entre ces deux bénédictions. Concernant celle de Mé’hayé Hamétim, son objet étant de se réjouir, en rencontrant cet ami de le savoir en vie, elle n’a plus de raison d’être si on le savait déjà. Par contre, concernant la bénédiction de Chéé’hiyanou, son objet étant de manifester la joie que l’on éprouve, non pas à savoir cet ami en vie, mais à le rencontrer à nouveau en tête à tête, le fait d’avoir eu récemment de ses nouvelles ne change rien à l’affaire. C’est pourquoi la majorité des décisionnaires s’inscrit en faux contre le Michna Broura et stipulent que le fait d’avoir eu entre temps des nouvelles de cet ami dispense de la bénédiction de Mé’hayé Hamétim mais non pas de celle de Chéé’hiyanou.
Rav Azriel Cohen Arazi
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