Le P’tit Hebdo: Que représente pour vous la fête de Pessah?
Sofa Landver: C’est la fête à laquelle le ministère de l’alya et de l’intégration ressemble le plus! Nous allons chercher les Juifs dans le monde et nous les amenons dans leur pays. C’est pourquoi je suis heureuse quand je vais à l’aéroport accueillir des olim ou quand je vais les visiter dans le pays. Je vois la joie dans leurs yeux et nous sommes si contents de les aider dans ce rêve.
Lph: Comment vous sentez-vous pour ce deuxième mandat après une période où vous étiez dans l’opposition?
S.L.: Je suis heureuse d’être revenue. On plaisante toujours en disant que je suis une ”citoyenne de retour”, à la différence qu’un citoyen de retour a quitté le pays de son plein gré.
Je reviens avec plus d’expérience dans les combats pour obtenir des budgets pour mon ministère. Je me souviens que j’ai pleuré lors des débats pour le premier budget lorsque j’ai compris que le ministère de l’alya et de l’intégration ne faisait pas partie des priorités du gouvernement.
Lph: Et aujourd’hui? Etes-vous satisfaite?
S.L.: Depuis que je suis arrivée le nombre d’olim a doublé. Nous avons mis en place beaucoup de projets pour faciliter l’intégration des olim. Aujourd’hui je ne pleure plus, mais je me bats toujours avec la même fougue pour l’intérêt des olim et les résultats sont au rendez-vous.
Lph: Les olim de France ont l’impression que depuis que les chiffres de l’alya ont baissé, on s’intéresse moins à eux. Le poste d’Ariel Picard a été supprimé, nous n’avons plus d’interlocuteur francophone au sein de votre ministère. Est-ce de la paranoïa ou considère-t-on moins la alya de France que les autres alyot?
S.L.: Ce n’est pas de la paranoïa. La vie m’a appris qu’il ne faut pas se battre contre ce que les gens ressentent. Je veux rassurer les olim de France. Un conseiller extérieur est en cours de recrutement, pour faire le lien entre les olim de France et notre ministère. Il aura un poste avec des prérogatives encore plus importantes que précédemment.
Lph: La création des ”proyektorim” a été une bénédiction. Allez-vous encore développé cette idée?
S.L.: Nous avons 105 proyektorim dans tout le pays. Une partie parle le français. Nous avons augmenté le nombre de proyektorim (conseillers d’alya) qui s’occupent des olim de France. Mais ce sont les municipalités qui choisissent les personnes, nous ne faisons que subventionner. Ces postes sont gérés en fonction des besoins de l’alya et de l’origine majoritaire des olim.
Lph: Que vous inspire la baisse du nombre d’olim de France?
S.L.: Quand je vois encore aujourd’hui les images d’un cimetière juif profané en France, je demande aux Juifs de France: combien peuvent-ils encore supporter? Combien de temps peuvent-ils encore attendre?
Je me suis rendue plus d’une fois en France et tout ce que j’ai promis aux candidats à l’alya a été concrétisé. Ce sont les promesses de la ministre de l’alya et de l’intégration d’aider à intégrer dans les domaines de l’emploi, de l’entreprenariat ou de la jeunesse, par exemple. Avec le Premier ministre, j’ai décidé de donner la priorité à quelques pays dont la France. Nous avons agi pour faire tomber de nombreux obstacles notamment en matière de reconnaissance de diplômes.
Je fais mon introspection. Je ne tiens personne d’autre que moi pour responsable. Il est indispensable pour moi de pouvoir dire que j’ai tenu mes promesses.
Lph: Le chemin pour les olim demeure difficile.
S.L.: En tant qu’ancienne ola, je sais que faire son alya n’est pas facile. Nous faisons plus qu’il n’a jamais été fait en faveur des olim aujourd’hui. Mais je voudrais attirer l’attention des olim sur un point important: apprenez la langue. Quand je rentre dans une classe d’oulpan et que je constate qu’il manque une bonne partie des élèves, parfois parce qu’à peine deux mois après leur alya, ils sont déjà retournés passer quelques jours en France, je me demande pourquoi? Apprenez la langue, investissez-vous! L’alya demande du travail.
Dans mon ministère, nous recevons les olim de France avec beaucoup d’intérêt et nous faisons le maximum pour les aider. Mais les olim doivent aussi faire leur part.
Lph: La question du travail est l’une des plus décisives pour les olim. Faites-vous suffisamment dans ce domaine?
S.L.: Nous faisons beaucoup. Je profite de l’occasion pour féliciter l’action de Qualita dans ce domaine et de toutes les associations de terrain mais aussi les olim qui s’investissent. Nous avons ouvert plusieurs formations pour les médecins, pour les infirmières, pour les avocats, les pharmaciens, les informaticiens, les métiers de la hi-tech. Nous subventionnons les employeurs qui embauchent des olim. Nous permettons des emprunts à des conditions hyper avantageuses à hauteur de 25000 shekels pour les entrepreneurs olim. Nous avons ouvert un projet Neguev et Galil, pour favoriser les olim qui choisissent de s’installer dans ces régions. Faisons-nous suffisamment? Nous faisons beaucoup avec un grand soutien du gouvernement.
Lph: Comment a démarré l’alya de France en 2017?
S.L.: Alors que l’alya en général a augmenté, celle en provenance de France est en baisse.
Lph: Peut-être faut-il alors prévoir une révolution pour que ce chiffre augmente à nouveau?
S.L.: L’alya est une décision personnelle. Pour moi, la révolution dont vous parlez se situe au niveau de chaque individu. Si pour lui, sa vie est en Israël, alors nous sommes des partenaires idéaux et notre porte lui est ouverte pour tout.
Lph: Que souhaitez-vous pour l’Etat après la sortie d’Egypte?
S.L.: Que les olim de France viennent. Quand je vois les images de France, je m’inquiète. Je vois qu’il existe une probabilité que l’extrême-droite arrive au pouvoir. Nous ne faisons qu’observer et ne voulons pas nous mêler des élections. Je ne souhaite pas que ce soit des élections ou le terrorisme qui influencent les décisions. Je souhaite que chaque juif prenne conscience que sa maison est en Israël.
Le bonheur d’être sur notre terre, c’est celui de se lever chaque matin, de regarder par la fenêtre, de voir que nos voisins sont Français, Ethiopiens, Russes ou Tsabarim et de penser que nous sommes tous Juifs, que nous construisons ensemble notre maison. Le bonheur d’être sur notre terre, c’est de savoir qu’ici nous serons toujours bien traités et que nos enfants grandiront heureux. Hag Sameah!
Propos recueillis par Avraham Azoulay